LES HIVERNALES/CDCN D’AVIGNON – Du 10 au 20 juillet 2022
Avec “Générations – Battle of portraits” Fabrice Ramalingom réunit Jean Rochereau, 78 ans, ancien danseur de Maurice Béjart, Félix Blaska et Dominique Bagouet, et Hugues Rondepierre, jeune danseur de 23 ans. Les deux hommes ont déjà partagé le plateau sous la direction de Fabrice Ramlingom pour “Frérocité” ; ils approfondissent ici leur rencontre. A l’unisson, en contrepoint, en pas de deux, toutes les figures relationnelles sont convoquées, à l’exception de l’emblématique écueil de la figure paternelle, et son lot de transmission ou d’héritage, que la différence d’âge aurait pu induire.

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Ambiance sonore issue du spectcacle
Des dimensions de l’espace aux dimensions de l’existence
Seul sur scène, Fabrice Ramalingom nous accueille : une phrase chorégraphique, un sourire, un regard… la salle se remplit. Il appelle : “Hugues !” et Hugues Rondepierre descend les gradins et rejoint le plateau. Il appelle : “Jean !” De l’autre côté de la salle, par l’escalier d’en face, Jean Rochereau descend les marches et monte sur scène. Fabrice Ramalingom s’en va.
L’écran du fond de scène évoque une avancée lente sur un chemin creusé à même la roche, à plusieurs mètres de profondeur. Au loin, en point de fuite, une pinède semble, paradoxalement, s’éloigner au fur et à mesure que la caméra avance. Sur le plateau noir un chemin blanc tracé par un tapis de danse, perpendiculaire au sentier qui conduit à la pinède, fait de la scène un carrefour, une intersection où l’on cohabite avant de reprendre le cours de sa trajectoire. On y parle de la mort, d’ornithologie, de liberté individuelle, de vernis à ongle, de grève générale et de corps collectif. L’écriture chorégraphique dessine une troisième dimension, verticale : nous voilà sur le plan géométrique de nos existences – la profondeur et le temps, la largeur et l’alter ego, la hauteur et l’indicible qui ne cherche même pas à se dire. Aux trois dimensions de l’espace, correspondent les trois dimensions de l’identité humaine : le temps et le devenir, soi-même comme un autre, le bipède politique regardant les oiseaux. Ipséité, mêmeté, spécificité.
Une dramaturgie relationnelle
Générations – Battle of portraits se construit en dehors du concept binaire de vanité/utilité, un peu comme l’image inversée d’En attendant Godot, ou une sorte d’ante-Sartre : la mort qui ne serait pas une angoisse, les autres qui ne seraient pas un enfer, la conscience qui ne serait pas une distinction humaine.
Le temps, ici, n’est ni linéaire ni cyclique : s’il existe un retour du même, c’est toujours sous une forme différente, selon une modalité nouvelle, doté d’un sens inédit. Entre ces deux hommes, c’est donc la ressemblance, malgré les variations modales, qui saute aux yeux : une ressemblance sans simulitude qui permet la singularité. L’écriture de Fabrice Ramalingom explore tous les connecteurs relationnels à l’exception du “contre” : “Avec”, “Pour”, “En miroir”, etc. Le duo se construit en symétrie, en translation, en rotation ou en homothétie : un véritable “plan cartésien” de coexistence pourrait-on dire. La rencontre, joueuse, entre Hugues Rondepierre et Jean Rochereau structure les corps selon une palette relationnelle allant de la réciprocité à l’équivalence en passant par la complémentarité. La singularité de ces deux hommes n’existe que dans cette rencontre chorégraphique, une singularité pensée comme un point de coordonnées entre l’axe du temps et celui de l’identité hic et nunc : être là, être cet individu-là, être humain parmi les oiseaux.
Marie Reverdy
Générations – battle of portraits / https://www.rama.asso.fr/?piece=generations
Conception-chorégraphie : Fabrice Ramalingom. Interprétation : Jean Rochereau, Hugues Rondepierre. Regard extérieur : Nathalie Collantes. Lumières et scénographie : Romain de Lagarde. Paysage sonore : Matthieu Doze. Réalisation vidéo : Sébastien Casino assisté de Boris Proust. Costumes : La Bourette. Régie générale : Bastien Pétillard.
Production : R.A.M.a. Coproduction : La Maison CDCN Uzès Gard Occitanie, avec le soutien de la ville de Pont-Saint-Esprit et dans le cadre du dispositif Résidence association de la région Occitanie et de l’Accueil studio du dispositif soutenu par le Ministère de la Culture DRAC Occitanie / Midi-Pyrénées ; Paris Réseau Danse (Atelier de Paris CDCN, L’étoile du nord scène conventionnée d’intérêt national art et création pour la danse, Micadanses-ADDP ; Le Regard du Cygne-AMD XXe) ; Théâtre de Nîmes, Scène Conventionnée d’intérêt national – art et création – Danse Contemporaine ; La Manufacture CDCN Nouvelle-Aquitaine Bordeaux ● La Rochelle. Avec le soutien d’Occitanie en Scène et de la Spedidam
R.A.M.a est soutenue par la Direction Régionale des Affaires Culturelles d’Occitanie et de la Ville de Montpellier.
Prochaines dates :
-le 23 septembre 2022 au CCN. de Tours
-les 18 et 19 novembre 2022 au Regard du Cygne (Paris Réseau Danse)